J'ai passé trois
jours et trois nuits avec G., en Vendée. Trois jours fabuleux en
tous points, sans anicroche, dans l'entente et l'harmonie la plus
totale. Si on excepte le départ, si on excepte le fait que je l'ai
quitté, que nous nous sommes dit adieu.
S'embrasser pour les
dernières fois, les larmes mouillant et salant nos lèvres, toucher
nos peaux pour la dernière fois, nous dire des choses essentielles
pour la suite l'un sans l'autre, se fût doux, comme on sait l'être
tous les deux, mais déchirant.
Mais le plus
terrible, c'était le lendemain matin, au réveil. Revenir au monde
sans lui, c'était une blessure que le jour cuisait, sur laquelle ma
conscience buttait alors que j'aurais voulu replonger dans le
sommeil, dans ce monde où G. était surement encore là, où le
manque n'existe pas.
Ce séjour en
Vendée, c'était une riche idée, en même temps qu'un sacré cadeau
empoisonné.
Mais si quitter G.
est si pénible, et même momentanément insupportable, j'ai des
souvenirs magnifiques, des souvenirs d'orgasmes gigantesques,
d'orgasmes sous le ciel bleu et les ajoncs, j'ai des souvenirs de
réjouissances à plusieurs, des souvenirs d'avoir réussi à trouver
l'équilibre entre la tendresse et le vice.
Le temps était
suspendu. Je ne savais plus si j'étais là, en Vendée avec G.,
depuis vingt minutes ou dix jours. Nous n'avions pas d'heure, si ce
n'était celle de nos désirs. Telle une chatte en maraude j'en
aurais oublié de manger. J'avais perdu l'appétit, sauf lorsque nous
nous attablions pour faire un repas de ce que nous avions choisi
ensemble, et là, tout à coup, je mourrais de faim et je dévorais.
Le monde était à
la fois gigantesque, avec l'océan, le ciel, l'immense plage, les
étendues de landes et de dunes à perte de vue, et inexistant. Nous
étions dans notre bulle d'amour et de bonheur, à l'abri de la
violence du monde.
Il y a, dans les
dunes de la plage du petit pont, tout un petit peuple de pervers.
G. m'avais souvent
parlé des rencontres qu'il y faisait, s'y faisant sucer ou suçant.
J'étais toujours curieuse qu'il me raconte ses escapades à la
plage, tout comme j'étais friande de ses récits de sauna aux heures
gay. Tout ces hommes (car j'y ai vu surtout des hommes, même s'il y
vient des couples et parfois des femmes seules) se connaissent au
moins de vue (et souvent « de cul », dirons-nous) mais on
en sait parfois bien plus. Il y a des contrôleurs du trésor, des
musiciens, des pères de familles qui parlent de leurs enfants, des
maris qui parlent de leurs femmes, etc...
La dune, c'est un
peu le paradis des exhibs, qui font le bonheurs des voyeurs encore
plus nombreux. Lors de notre première après-midi à la plage du
petit pont, G. et moi nous sommes trouvé un petit coin un peu
protégé, mais pas trop. Ca allait et venait à proximité, ca
aurait bien participé, mais G. avait envie de rester seul avec moi,
et les amateurs de sexe se sont contenter de mater et d'envier ce
bienheureux homme. Même si j'avais imaginé faire autre chose que
rester à deux dans les dunes, être regardée, et entendue, par
nombre de voyeurs, et puis avoir au dessus de ma tête et dans les
yeux les ajoncs et le ciel perlé de quelques nuages, le bruit de la
houle, puissante ce jour là, dans les oreilles, le vent tiède se
coulant sur mon corps, tout en me faisant lécher goulûment par G.,
suffisait amplement à mon bonheur, et même à mon extase. Il aurait
fallut être difficile pour ne pas trouver ca simplement magique.
Après un cuni en règle, nous avons opté pour une levrette. C'était
le début de la soirée, l'assistance s'était clairsemée même si
deux voyeurs nous observaient encore, planqués non loin, et sur le
soleil couchant j'étais nue, à quatre pattes, les genoux calés
dans le sable sur la couverture, G. en train de me besogner assez
furieusement en murmurant des choses indistinctes et que je pouvais
traduire selon mes besoins en choses douces ou choses crues. Hurler
de plaisir dans la nature, lancer son cri sur la landes qui court à
l'infini, dans cette posture animale, avec rien en face de soi que le
sable et la végétation, c'est un peu retrouver le cri primal, avoir
l'impression de participer à la naissance du monde, retrouver les
temps immémoriaux.
Le lendemain, j'ai
mieux fait connaissance avec C. et un autre type dont le prénom
m'échappe.
Avec G., nous avions
passé une partie de l'après-midi sur la plage, un peu en retrait
mais pas encore dans les dunes, coincés entre deux mondes : celui
des baigneurs naturistes, venus là en famille ou en couple, et celui
des obsédés du cul, errant dans le sable à le recherche d'une
opportunité. Dans cet entre deux, nous étions le couple venu
profiter de la plage, tout en excitant la curiosité des voyeurs
perchés sur la dune. Nous nous étions laissé allé à quelques
caresses un peu coquines : j'avais consciencieusement enduit d'huile
solaire le sexe de G., il m'avait plus tard tété les tétons.
Le soleil et la
température baissant, la plage se vidait, laissant le champs libre
au petit peuple des dunes. C'est alors que G. me proposa de demander
à C. de se joindre à nous. Ils se connaissaient, s'étaient sucé
de temps à autre, se retrouvant d'une année l'autre. Je savais tout
cela.
Je n'hésitai pas
longtemps. G. disparu un moment derrière la dune qui était en
surplomb et revint vite. C'était bon, on y allait, mais il avait dit
non à un autre mec qui papotait avec C. Sauf que le mec nous emboita
le pas. J'apercevais en ligne de mire le chapeau de C. caracoler dans
les dunes, vraisemblablement à la recherche d'un lieu propice à
notre projet. Je suivais un peu péniblement en piochant dans le
sable, accrochée à la main de G., l'invité surprise dans mon
sillage.
Les choses
commencèrent très vite. Un peu trop vite pour moi. A peine assis
sur la couverture dans l'endroit choisi par C., l'invité surprise
nous assura qu'il ne faisait que regarder et à peine avait-il notre
accord que C. poussait déjà la tête de G. vers la queue qu'il lui
tendait. G. ne se fit pas prier et se mit a sucer goulument, mais mon
cœur se serra en une panique instinctive. Peut-être parce que je
n'aime pas qu'on me fasse cela, qu'on pousse ma tête vers la queue à
sucer. Mais c'était, certainement, un changement de perspective un
peu radical et rapide pour moi. Mon G., mon mâle, traitée comme une
vulgaire soumise ?! J'avais peur tout à coup de ne pas reconnaître
mon G., et de le perdre donc. Je ressentais le besoin irrépressible
de rétablir le contact, de me rassurer, et peut-être de le rassurer
lui. Je me glissais contre lui en chien de fusil, nous étions
quasiment face à face pendant qu'il pompait vigoureusement C. Je le
caressais doucement un peu partout, faisant courir mes doigts sur
lui. Je croisais la main de C. qui caressait ses fesses. Je
l'embrassais, le léchais sur tout le torse, sur les bras, attrapant
de temps à autre sa queue toute molle dans ma bouche pour la
suçoter. J'ignorais s'il appréciait, mais je continuais pour moi.
Plus tard, quand nous en avons parlé, il m'a dit que si je n'avais
pas été là, tout contre lui, à le câliner, il m'aurait cherché,
que cela l'avait rassuré de me sentir contre lui, et que je m'occupe
de lui tout doucement. Rassuré de quoi me suis-je demandé ? Pas de
se retrouver à sucer C., c'était devenu sinon banal du moins
courant pour lui. Surement rassuré de savoir que je suivais le
mouvement, que j'appréciais le moment, rassuré que je le considère
toujours comme mon homme.
De temps en temps je
coulais un regard pour observer la bouche de G. qui s'activait sur la
bite. Il avait une technique goulue, jouant des lèvres, de la
langue, avalant largement la queue pas très longue ni très grosse
du mec. Il enveloppait le gland d'une langue bien souple, et de temps
à autre le titillait du bout, et puis avalait le membre avec
gourmandise. A quelques occasions j'ai croisé le regard de G. qui
cherchait le mien, et à chaque fois cela m'a inondée de tendresse
en même temps que je me sentais indiscrète de le regarder faire
ainsi.
Mais tout à coup,
j'ai senti deux mains sur moi, sur mes fesses. J'ai crié « non
: » en me retournant. Un papi ventripotent, rouge de peau,
blanc de poil, était penché sur moi, tardant à retirer ses mains.
En un réflexe G. avait levé la jambe, une détente suffisait pour
écraser le nez du type qui fini par reculer devant l'insistance de
G. qui devenait menaçant.
L'incident ne nous
perturba pas outre mesure cependant, et les opérations reprirent. A
un moment, j'ai pensé que j'aurais aimé rejoindre G. et sucer avec
lui. Mais C. ne me disait rien du tout. Pas dans l'absolu mais dans
sa façon d'avoir brusqué les choses au départ.
Le type n'a pas été
très long a donner des signes de fin. Je crois avoir entendu
quelques mots que j'ai préféré oublier, et puis une autre angoisse
me vint. Je n'avais pas envie que le mec éjacule dans la bouche de
G. Je n'avais pas envie qu'il m'embrasse juste après sinon. Quand je
vis le ventre de C. abondamment couvert de son sperme, je fut
rassurée. Et puis G. a pris soin de ne pas m'embrasser tout de suite
et même de se rincer la bouche avant.
Mais C. repartait.
Il devait rentrer à l'heure pour la soupe, madame avait déjà bien
couiner la veille de son retour tardif. Il me dit que G. était doué,
et qu'il fallait aussi me remercier pour ce bon moment. Il me posa un
smack sur les lèvres et fila vers ses obligations familiales.
Nous sommes rester
avec le voyeur. Qui continua de ne rester que voyeur et assista à
nos ébats, tenailler par l'envie de participer. J'étais un peu
tourneboulé par la rapidité des choses, et j'eus plaisir à
retrouver G. pour moi, à mon rythme.
Mais c'est plus
tard, quand nous reparlâmes de ce qui s'était passé, que cela
m'excita le plus. Libéré de l'impression de précipitation, dans
une intimité retrouvée, j'éprouvais un grand plaisir à dire à G.
qu'il savait drôlement bien sucer, et que j'avais pris soin
d'observer sa technique. J'aimais a repenser à la bouche de G. sur
la queue du mec, et cela m'excitait de lui dire que j'aurais aimé
participer et sucer avec lui.
Le lendemain, nous
sommes restés sages sur la plage, plus près de l'eau, sans aller
dans les dunes. Nous avions un resto de prévu et donc pas trop de
temps en début de soirée, et puis l'ambiance était à autre chose.
Nous avons joué
avec la mer. La houle était encore trop puissante pour se baigner
vraiment, alors nous jouions à nous faire peur en attendant les plus
grosses vagues, en sentant nos pieds s'enfoncer dans le sable au
moment du reflux. A un moment, j'ai décidé de m'asseoir dans une
énorme vague pour que tout mon corps profite de l'eau. Je riais, un
peu chahutée par l'océan. G. m'a imité. Et puis, tout à notre
plaisir, nous avons été surpris par une vague plus puissante que
les autres. Elle nous a recouverts, roulés, tirés sur le gravier,
puis remportés un peu dans l'autre sens, nous laissant des
égratignures sur les fesses et le dos. Je riais à perdre haleine, à
moitié étouffée par l'eau.
Plus tard, allongés
l'un contre l'autre, nous nous caressions doucement. Nous nous
souriions, les yeux plongés dans les yeux de l'autre. Nous nous
embrassions, et j'étais agitée d'une envie qui devenait
irrépressible. Alors je collais ma bouche à son oreille et je
disais les deux mots qui allait me libérer de cette envie : « je
t'aime ». A son regard un peu perdu tout à coup, à sa façon
de presser ses lèvres l'une contre l'autre puis de me serrer très
fort contre lui en enfouissant sa tête contre ma poitrine, je
compris qu'il aurait voulu me dire la même chose, mais que c'était
impossible, qu'il ne s'y autorisait pas. Et c'est avec des
périphrases chantournées qu'il me le dit le lendemain, à quelques
heures de me quitter : « la chose que tu m'as dites deux fois,
tu sais... Moi aussi je le pense, mais je peux pas le dire ».
Et puis, sur le quai, au moment où le train partait, il a fait un
cœur qui bat avec ses mains.
C'est pas comme si
j'avais pas déjà vécu une histoire d'amour avec un mec en couple.
C'est pas comme si je ne connaissais pas déjà cette douleur. Non,
vraiment, c'est pas comme si...
Tant d'émotions...
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