vendredi 5 avril 2013

La canard d'Ithaque

Comme je l'ai raconté ces jours-ci, désormais, les hommes m'abordent plus facilement. Et même carrément facilement ! A deux par semaine on peut se demander s'il n'y aurait pas complot.

Mais, de même qu'une hirondelle ne fait pas le printemps (surtout cette année, qu'est-ce qu'on se les caille !), quand ça mord, c'est pas toujours du premier choix.

Remontons dans le temps, jusqu'au mec de l'expo. J'étais moyennement emballée par le physique du gars, et par son allure de vieil hippie. Et quand j'ai lu son mail, à peine de retour chez moi, la suspicion s'est amplifiée. J'avais ensoleillé sa journée, tout ça. Je le mis en garde : faire connaissance, rencontrer de nouvelles têtes, oui, mais précisais-je, je n'étais pas super open ces temps-ci. Quand il s'enthousiasma à l'idée de me revoir, et qu'il précisa combien il était impatient de me parler de ses nombreuses passions (qu'il me lista !), le doute n'était plus permis : ce type était un énième égocentrique placé sur ma route. Lorsque le lendemain matin, à 6h25, je reçu un mail qui commençait par : « mes premières pensées sont pour toi », j'ai manqué d'air.

J'ai donc renvoyé le monsieur à ses passions.

Et Monsieur Impulse alors ? Je lui ai envoyé un sms prudent, proposant que l'on fasse connaissance autour d'un verre. L'idée l'enchanta tellement qu'il me proposa de venir le rejoindre tout là-bas derrière le périf, en bout de ligne de métro, dans un endroit super : chez lui. Il me vendait le truc en disant que son appart était drôlement chouette, avec balcon (qu'est-ce que ça peut me foutre ? Je cherche pas à investir dans la pierre !), et que c'était là qu'il recevait les gens très importants pour son métier d'artiste. Une bonne adresse en somme, mondialement connu. Je n'avais plus qu'à me féliciter de ma bonne fortune et remercier le grand homme de s'intéresser à mon insignifiante personne.

Je suis peut-être vieille France, mais un inconnu qui me propose de venir chez lui direct (à Tataouine en plus), je prends ça pour une invitation à écarter les cuisses rapidement et sans manière. Probable que la bière serait tiède et que les préservatifs seraient à ma charge. Je connais la musique ! Même si c'est lui qui voulait me jouer du piano vu que c'est son instrument (et peut-être surtout du pipeau).

L'échange tourna alors à l'aigre. Et malgré les smiley qu'il utilisait à foison, je suis restée plus que dubitative quand je lu : « Tu crois que je voulais te sauter ?? Tu te prends pour un sex symbol ;) ?!? :) ». Çà restait romanesque en un sens, mais on passait de L'Astrée à Nana sans transition. Me suis pas démontée, je lui ai demandé : « pourquoi ? Tu sautes que des sex symbol ? » Ambiance, ambiance...

Résumons-nous. Il y a du changement, indéniablement. Mais plus dans la forme que dans le fond. Je me fais l'effet du vilain petit canard. J'ai quitté ma famille qui me traitait mal et dont je me sentais si différente. Depuis j'erre à la recherche de ma vraie famille, en subissant diverses avanies. Cette série de messieurs qui me courent après dans la rue ou les couloirs d'expositions ne semblent être qu'un épisode supplémentaire de l'épopée. 

On pourrait aussi penser à Ulysse et son périple. Et pendant que j'irais de Charybde en Scylla, une improbable Pénélope vieillirait en une Ithaque de légende, peinant à défaire et refaire son éternelle tapisserie.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.