lundi 30 avril 2012

L'effet tour Eiffel

C'était vendredi et j'avais récemment changé mon texte d'annonce sur le site de cul où je drague pour me mettre en stand by. Oui, un café, la veille, avec une énième lavette, rougissante et inconsistance à souhait avait eu raison de mon enthousiasme. J'avais visiblement la main mauvaise ces temps-ci, autant me mettre en retrait. Je commençais même à me demander si je n'étais pas atteinte du fameux syndrome de "la place prise". Lorsque je me sens vraiment bien avec un homme, j'ai de la peine à lui trouver de la concurrence à sa mesure. Une façon archaïque et inconsciente de me consacrer à un seul. C'est agaçant, mais c'est comme le syndrome pré-menstruel ou la pluie pendant les vacances, faut s'occuper intelligemment en attendant que ça passe.

Et donc, en ce vendredi matin, un homme avec qui j'avais discuté quelques fois vient me causer sur le chat. Je l'avais éconduit à cause de ses photos. Il me semblait tout maigre, pas bien grand, ridé et un peu stupide sur ses photos de vacances. Je suppose aujourd’hui que ces photos ont été prises par sa femme, et que c'est un peu comme les caleçons ridicules que les femmes de E. (madame épouse et madame mère) lui choisissait : le rendre inconsommable pour une éventuelle maîtresse, ou au moins le ridiculiser.

Cet homme avait visiblement décidé de me séduire, il ne lâchait pas l'affaire, et il revenait à la charge, de façon régulière mais sans insistance, échangeant seulement quelques minutes avec moi. Et ce matin là, sentant certainement qu'il lui fallait jouer son vatou, et puisque je refusais ses propositions de verre et autre restaurant, tout en m'ouvrant à lui de mon désappointement concernant mes contacts masculins (la fourbe), il me demanda si cela me tenterait d'"avoir Paris à mes pieds". Il me proposait ni plus ni moins qu'une visite en VIP de la tour Eiffel, en zappant les queues. J'ai imaginé l'employé municipal en blouse marine me faisant profiter de l'entrée de service. Et puis le trou du cul qui me force la main pour obtenir un rendez-vous et me propose de finalement faire la queue ensemble pour monter. Après avoir évalué qu'au pire je me déplaçais jusqu'à la tour Eiffel pour rien et en profiterais alors pour aller faire un tour à Orsay ou l'Orangerie, j'acceptais de retrouver le monsieur en début d'après-midi.



Visiter la tour Eiffel, enfin ! Et sans me taper les heures de queues qui m'avaient jusqu'alors rebutée ! Je kiffais grave ! 

A l'heure dite, j'étais sur place, et je repérais un monsieur habillé avec recherche sortir des bureaux du pilier nord et s'appuyer à la rambarde pour fouiller la foule des yeux. Il se tourna vers moi pour poursuivre son tour d'horizon et avant même qu'il ne me repère, et en un instant, je savais que ses photos ne lui rendaient pas justice, qu'il avait un regard bleu à tomber, qu'il travaillait bien à la tour comme mon intuition me l'avait soufflé mais qu'il n'en était pas un employé de base, qu'il était raffiné, et qu'il me plaisait. 

Nous nous sommes fait la bise et il m'a proposé que l'on se tutoie. Je crois bien qu'à ce moment là nous savions tous les deux à quoi nous en tenir. Enfin, en tout cas, moi, je savais : j'avais envie de mieux connaitre cet homme, pour peu qu'il ne fasse pas de boulette rédhibitoire. Et lui avait envie de me toucher partout. Ce qu'il eu bien du mal à juguler, saisissant diverses occasions pour me saisir le bras, me frôler la main, entourer mes épaules pour me guider, et même, summum du geste choupinet, tripoter un peu nerveusement mon écharpe. Tout cela, bien sur, tout en me conduisant à travers son domaine, de la salle de contrôle vidéo jusqu'au troisième étage et demi, tout en haut, au dessus des visiteurs stoppés au troisième, en passant par les coulisses techniques d'où l'on voit la tour vraiment de l'intérieur. Il m'expliqua un nombre incroyable de choses sur la tour, sur son histoire, son entretient, avec quelques anecdotes plus personnelles. La tour était à nous, en dépit des queues de visiteurs. Nous entrions dans les ascenseurs par la sortie, faisant fi de la foule qui avait attendu des heures pour mériter ce que cet homme, dont j'ignorais encore le prénom, me faisait cadeau sur un plateau. 

Je me sentais bien avec cet homme, et à quelques reprises, alors qu'il se penchait sur moi pour regarder dans la même direction que moi et me faire repérer tel monument ou tel bâtiment, j'ai eu envie de me blottir contre lui. J'aimais sa façon d'être avec moi. A la fois tactile mais jamais déplacé, séducteur sans être balourd ou écrasant, attentif à moi sans être obséquieux. Il brillait, il était certainement content de m'en mettre un peu plein la vue, mais il m'accueillait avec simplicité et sincérité, pour autant que je pouvais en juger. 

Revenus en bas de la tour, et c'est là qu'il a trituré mon écharpe, et que j'ai pu voir de près, sur sa main dansant sous mon visage, son alliance, revenu en bas de la tour donc, il m'a confié sa carte de visite me recommandant d'en faire usage si jamais j'en avais envie. Puis il m'a fait la bise aussi tendrement que le permettait le lieu, au milieu des employés et collègues qui pouvaient nous observer, pressant ses lèvres tout près des miennes. 

J'ai ensuite mis presque 48h00 a redescendre de la tour Eiffel. Après le syndrome de Stendhal, l'effet tour Eiffel.


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